RadioSouvenirsFM

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jeudi 27 novembre 2008

Technologie_L'âge mûr du cinéma numérique



Paris accueillait cette semaine «Parisfx», deux jours de conférences sur les images de synthèse. Etat des révolutions dans un monde d'espoirs et de doutes.

Tout le monde ou presque sait utiliser les mots travelling, gros plan, panoramique, autrement dit le vocabulaire de la technique cinématographique. Demain, dans cinq ou dix ans, qu'importe, mais assurément chacun prononcera les termes, très anglophones, de ride, compositing, extensions,pipe-line ou cost killing. Pas de panique, cela viendra aussi imperceptiblement que la technique des images numériques a passé, en un quart de siècle, des polygones criards qui servaient de simulateurs de vol à la fin des années 70 à des représentations où tout est désormais possible.

L'image numérique est à maturité: quotidienne et capable d'un rendu ultraréaliste, elle est devenue invisible. Et pourrait bientôt se confondre avec la réalité: invité surprise du rendez-vous professionnel Parisfx cette semaine, Jeffrey Katzenberg, le patron de DreamWorks, a révélé qu'Intel, partenaire du studio hollywoodien, est en train de développer un système de capture de la réalité en trois dimensions. Traduction: les films et les documentaires en relief sont pour demain. Et Intel n'est sans doute pas seul dans la course.

C'est que les enjeux du numérique sont gigantesques. Et pas uniquement dans les films d'animation en images de synthèse qui ont, depuis le premier d'entre eux (Toy Story, 1995), rapporté plus de 10 milliards de dollars avec leurs seules entrées. Hollywood dévore bien sûr la majeure partie du gâteau, mais d'autres pays, comme la Belgique qui vient de sortir Fly Me to The Moon ou encore la Grande-Bretagne, osent se positionner.

Au premier plan: la France, en particulier la région parisienne. L'Hexagone numérique, ce sont 25 entreprises de petit format, environ 500 salariés et autant d'intermittents qui connaissent, depuis 2003, une croissance de 10% par an. Les plus grandes sociétés, comme Buff ou Mac Guff Ligne, recrutent à tour de bras, si bien que les pouvoirs publics ont pu mettre en place une filière de formation qui assure un bel avenir aux passionnés qui s'y aventurent.

Cette industrie numérique représente actuellement 13% du milliard annuel généré par le cinéma en France. Et, preuve que l'animation et le cinéma ne sont pas tout (40% des activités seulement), d'autres déclinaisons multimédias se renforcent, des jeux vidéo aux applications pour téléphones mobiles, sans oublier la publicité qui ne représente que 20% des activités, mais qui est, historiquement, la plus importante. La publicité occupe en effet une place à part depuis la naissance du numérique: c'est elle qui a été le lieu de la recherche; et surtout c'est elle qui a familiarisé le grand public avec les nouvelles images.

La chance de la France tient dans un aspect inattendu: la concurrence pourrait être féroce, mais même pour les Etats-Unis ou pour le Japon (curieusement très en retard dans ce domaine), le terrain est trop grand. C'est ainsi qu'un pays comme la Suisse, dont les grandes sociétés comme On Line Video, Elefant Studios ou Boost sont peu sollicitées car trop chères, est recruté pour ses compétences scientifiques (Pixar a un contrat avec l'EPFZ). Et c'est ainsi que la France, plus concurrentielle, se voit confier des séquences entières de superproductions (récemment Batman The Dark Knight ou Speed Racer), voire des films entiers (The Incredible Hulk). Les commandes affluent sur Paris des quatre coins du monde, qu'il s'agisse de l'Egypte ou de Dubaï.

Curieusement, dans cette émulation planétaire, la cinématographie qui se méfiait le plus du numérique de qualité française, jusqu'ici, était la cinématographie française! Rien d'étonnant à cela, sans doute, au pays de la Nouvelle Vague et de la caméra à l'épaule, là où le mot pixel est pour beaucoup une hérésie. Mais la mentalité change, le potentiel de l'outil numérique se révèle enfin et, preuve que l'heure de la maturité a sonné, les 25 entreprises d'images numériques françaises deviennent prophètes en leur pays.

Source : LeTemps.ch
Par : Thierry Jobin

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