RadioSouvenirsFM

RadioSouvenirsFM

mercredi 2 décembre 2009

Média_ Internet a-t-il tué le projet de radio numérique terrestre ?




Marc Tessier vient de rédiger un rapport intitulé « les perspectives de financement du projet de radio numérique terrestre (RNT) ». La conclusion résume la tonalité du rapport : le coût du lancement de la RNT en France est trop élevé pour être financé par l'Etat « au regard des avantages collectifs escomptés ». En d'autres termes, il est urgent d'attendre, et même de renoncer, car le rapport coût/avantages est en défaveur de l'investissement.

Il faut préciser que l'objet du rapport n'était pas de débattre de la légitimité du projet de Radio numérique terrestre, mais d'en apprécier les modalités d'exécution : durée du processus, période pendant laquelle il serait nécessaire de maintenir une diffusion en mode FM, attractivité des nouveaux services associés, disponibilité et prix des équipements, et évolution de la couverture radiophonique, tous ces éléments permettant de prévoir la rentabilité des investissements à consentir.

Que faut-il en effet pour réussir ce genre de projets ? Viser une couverture maximale et une qualité de réception optimale, envisager un arrêt de la diffusion FM, ne serait-ce que pour justifier un investissement aussi élevé. Cet arrêt requiert une dizaine d'années d'adaptation. Dix ans, à l'heure d'Internet, c'est considérable.

La réussite passe aussi par l'équilibre économique du projet. Or les éditeurs de radio ne disposent pas des ressources nécessaires. La radio voit son audience, et donc ses recettes publicitaires et sa rentabilité, reculer inexorablement.

Envisager une dépense de l'ordre de 600 millions à un milliard d'euros sur dix ans ne peut être raisonnable que si les ressources publicitaires augmentent de 20 à 25%. Une prévision bien incertaine compte tenu du contexte économique de compétition qu'Internet a fait naître autour de la publicité.
Un apport incertain pour l'auditeur

Côté auditeur-consommateur, plusieurs paramètres sont à prendre en considération : le prix du récepteur, mais aussi la possibilité d'écoute sur des baladeurs, des téléphones portables…, et les éventuels services associés (guides - résumés - photos des animateurs, météo, informations, jeux, concours…).

Mais la plupart de ces services sont déjà proposés sur les sites des éditeurs de radio, de sorte que la plus-value pour le consommateur n'a rien de spectaculaire. Il faudrait de surcroît que le coût additionnel de l'écran de visualisation, et donc le prix final des équipements, ne soit pas excessif. Or tel n'est pas le cas.

La dernière source d'un avantage consommateur résiderait dans la création d'une offre nouvelle, et dans l'extension de la couverture des radios déjà existantes. Mais nombre d'entre nous reçoivent déjà les émissions de radio, en direct comme en différé, sur une large portion du territoire, y compris les services associés interactifs, en se connectant via les réseaux haut-débit. Ont-ils vraiment besoin de la RNT ?

Nombre de questions demeurent enfin ouvertes, telle la réception pour les déplacements interurbains, notamment autoroutiers, via l'intégration des antennes de réception dans les véhicules. Question non réglée à ce jour.
Un coût pour l'Etat disproportionné en regard des avantages attendus

Au total, l'intervention financière de l'Etat, nécessaire à partir de 2013, devrait être largement supérieure à 100 millions d'euros par an. Trop en regard des avantages collectifs escomptés.

Marc Tessier rejette l'hypothèse d'un repli sur un projet revu à la baisse. En effet, il ne saurait être question de sursoir à la couverture complète du territoire. Et il est exclu de prendre le risque que des opérateurs jouent le jeu de la RNT, puis y renoncent, de sorte que les utilisateurs qui auront acheté un équipement en seront pour leurs frais.

Afin de se prémunir contre cette éventualité, il faudrait établir dès le départ que les opérateurs qui renonceraient à leur fréquence numérique en cours de développement devraient renoncer ipso facto à leur diffusion en FM. Or la loi n'a pas établi ce lien.

Bref, le rapport est clairement en défaveur de l'investissement. Cette position n'a pas fait plaisir à tout le monde, et en particulier au CSA (Conseil supérieur de l'audiovisuel), qui voyait là une occasion de s'occuper d'un joli chantier…

Source : Rue89.com Par Françoise Benhamou | Professeur d’économie à Paris-XIII

Aucun commentaire: