RadioSouvenirsFM

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vendredi 29 janvier 2010

Média_Radio Caraïbes, la voix de la détresse



Dès le lendemain du séisme, les journalistes de Radio Caraïbes ont installé leur équipement en pleine rue.

Jacques Montelus a parcouru les 70km qui séparent sa ville, la commune de L'Estère, de Port-au-Prince dans l'espoir de faire diffuser un message à la radio. «Notre hôpital n'a aucun matériel médical, il faut nous envoyer de la gaze, de l'équipement orthopédique», a-t-il écrit dans le communiqué qu'il voulait faire lire sur les ondes de Radio Caraïbes,

En attendant son tour devant le studio que cette station a aménagé en pleine rue, devant son immeuble sinistré, Jacques Montelus faisait part de son désarroi. «Nous avons 75 blessés, et il y a des gens de Port-au-Prince qui viennent chez nous parce qu'ils ont entendu parler de notre hôpital. Or, cet hôpital manque de tout. Je suis venu pour lancer un appel au secours!»

À quelques pas de lui, Nixon Placide brandissait lui aussi sa feuille de papier sur laquelle un message était tracé à la main. Il représentait le comité de citoyens du quartier du Bicentenaire, près de la mer. «Chez nous, la terre est fissurée, et l'eau monte. Les gens sont inquiets. Et nous avons besoin de nourriture, de médicaments. Est-ce que la communauté internationale peut nous aider?»

«Nous n'avons rien, ni nourriture, ni eau, ni couvertures, et nous avons plusieurs enfants, dont un bébé de 4 mois», suppliait, plus loin, une jeune femme qui habite le quartier de Debussy. Elle était venue avec une dizaine de voisins porter son message. Tous avaient les yeux cernés, l'air épuisé.

Avant le tremblement de terre, plusieurs dizaines de stations de radio se disputaient les ondes de Port-au-Prince. Radio Caraïbes était l'une des plus populaires. Son immeuble, qui abritait également une station de télévision, a tenu le coup le 12 janvier. Mais il est tout fissuré et ses fenêtres ont volé en éclats. Impossible de rester à l'intérieur.

C'est donc dehors, en pleine rue, que Radio Caraïbes prête son micro aux sinistrés. Dès le 13 janvier, les journalistes y ont installé leur équipement: une table, deux ordinateurs, une console de son et un ruban jaune qui délimite une rangée de chaises pour le public.

La radio est le premier moyen d'information en Haïti. Au lendemain du tremblement de terre, il y a eu un grand silence. Peu à peu, les ondes reprennent vie.

Mais depuis le séisme, Radio Caraïbes ne diffuse presque plus de musique. Elle sert plutôt de porte-voix aux sinistrés qui se sentent abandonnés et ne savent plus à quel saint se vouer.

«Au début, les gens nous demandaient d'annoncer qu'ils avaient une fille ou un fils sous les décombres, qu'ils étaient encore vivants, et ils demandaient de l'aide pour les sortir», raconte le journaliste Israël Jacky Cantave.

Cet animateur-vedette de Radio Caraïbes, qui se trouvait en studio au moment du tremblement de terre, a perdu sa maison, comme la plupart de ses collègues. La nuit, il dort dans son auto. Et le jour, il continue son boulot de journaliste.

Au fil des jours, les messages du public ont changé, explique-t-il. Les appels personnels ont cédé la place à des messages collectifs. Les sinistrés veulent attirer l'attention sur une ville, un quartier ou un bout de rue en attente d'une aide qui n'arrive pas.

«Les gens viennent vers nous parce qu'ils ne savent pas à qui s'adresser, dit Israël Jacky Cantave. Mais il n'y a personne à qui s'adresser. Et nous, nous ne pouvons pas les aider.»

Quelles chances y a-t-il pour que les appels radio aient des suites? Pas plus de 10%, estime Jacques Montelus.

Parfois, un message passe, note Israël Jacky Cantave. Pas souvent, mais cela arrive. Depuis quelque temps, Radio Caraïbes joue aussi le rôle de courroie de transmission entre des comités de citoyens qui s'organisent et le gouvernement, par exemple. Mais dans l'ensemble, selon le journaliste, lire un message à la radio, «c'est un peu comme écrire une lettre au pape».

Source : CyberPresse

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